La ruée vers les NFT, une nouvelle ruée vers l'or

Ecrit en 2021, demande révision les choses ont évolué

Une ruée, car si le concept est apparu en 2017 une simple recherche sur Google le 26-10-2022 retourne plus de 2,2 milliards de réponses (peut-être pas toutes pertinentes, mais), ou une recherche de livre sur Amazon avec NFT 5000 résultats, la plupart en anglais (même s'il y a un peu de tout). On peut bien parler de ruée.

Ruée vers l'or parce que de loin la principale motivation est la spéculation pour faire de l'argent (revente) avec de l'argent (mise initiale) notamment pour les collectionneurs. Les principaux acteurs (au-delà des informaticiens obligés, car un NFT nécessite une cryptomonnaie et serveurs) sont des financiers, en particulier des traders.

Cette spéculation repose sur la rareté, comme pour l'or disponible en quantité limitée et difficile à trouver dans la nature qui sert de refuge (puisque ça ne se mange pas, mais ça se négocie) ou un diamant (chaque diamant a son certificat pour se protéger d'une imitation, car seul un expert peut faire la différence) qui assure le statut de son propriétaire (pensez aux diamants au cou d'une grande dame au cours d'une réception). La rareté garantit aisance et prestige, attributs du pouvoir et du luxe.

Son application à l'art est a priori naturelle parce que le marché de l'art est un marché hautement spéculatif (pensez au prix actuel d'un Van Gogh et au fait qu'il n'a rien vendu au cours de sa vie et que ses œuvres actuelles qui ne sont pas dans des musées sont probablement dans des coffre-forts en zone franche en attendant d'être vendues aux enchères). Une reproduction numérotée signée est aussi considérée unique du fait de la signature de l'auteur (cas des lithographies ou de photos dites impression d'artiste).

La reproduction, numérique ou autre, des œuvres artistiques est soumise aux lois sur le droit d'auteur ou de reproduction. Ainsi, une œuvre “tombée” dans le domaine public par extinction des droits d'auteur (qui sont limités dans le temps) peut être librement reproduite, ce qui n'empêche pas de facturer des frais d'accès comme pour accéder à un musée ou le coût matériel de la reproduction. Dans l'application du droit d'auteur, les biens numériques posent un problème particulier.

Tous les biens numériques sont par leur nature reproductible, rien ne différencie une copie de l'original, à moins de créer délibérément une différence.

Ceci pose un problème pour les œuvres d'art que l'on veut protéger, la façon connue jusqu'ici est de les verrouiller (DRM pour bloquer la reproduction, ce qui implique un serveur de contrôle), d'en interdire l'accès pour prévenir les copies dans des espaces protégés, ou comme dans les développements en cours de négociation intégrer quelque chose dans l'original qui soit reconnu et respecté par les diffuseurs de copie.

La confusion est grande entre les univers virtuels (metaverse), la réalité augmentée et les NFT, avec comme toile de fond une gigantesque bataille économique pour le contrôle des réseaux, car le plus fort et gros devrait gagner (en raison de l'effet réseau, plus il y a d'utilisateurs, plus on en veut). L'engouement pour les univers virtuels, notamment dans les jeux (en ligne, immersion, jetons, marché des objets virtuels) entraîne des investissements majeurs des GAFAM qui y voient un immense marché qui justifie les milliards de dollars qui y sont investis. Les GAFAM y voient surtout une opportunité supplémentaire de contrôle des marchés publicitaires et de collecte de données encore plus grande sur nos vies intimes (origine de leur richesse).

Ainsi les millions valsent et de nouveaux articles apparaissent presque tous les jours dans les grands médias : la course aux réseaux et aux contenus est relancée par les metaverses qui impliquent une nouvelle technologie (logiciels, normes, matériel), les arts et les NFT en font partie. Nombreux ceux qui se pressent au portillon pour annoncer que les NFT sont la source d'un nouvel internet, car enfin les créateurs vont pouvoir être rémunérés. Si Google a pu s'imposer rapidement grâce à son algorithme "PageRank", l'avenir est aux NFT, nous prédit-on [1].

A priori il n'y a pas de lien obligé entre les univers virtuels ou la réalité augmentée, metavers (concept inventé dès la naissance d'internet), et les NFT. En effet, les NFT établissent la propriété d'un bien, notamment numérique (une photo, une vidéo, un enregistrement audio, un programme ou un fichier de toute nature) quelque il soit ou même autre que numérique (une statue, un tableau, une casquette, un document papier…,), mais unique et susceptible de faire l'objet de ventes et achats.

L'art conceptuel

d'Art ! d'art, Frédéric Taddei, Marie-Isabelle Taddei, Chêne, 2010, ISBN 978-2-81230-101-8

On peut le résumer ainsi : NFT est la preuve numérique inviolable et permanente de l'existence d'un objet comme une œuvre d'art numérique originale unique. Cette preuve a un propriétaire dès qu'elle est créée. Cette preuve peut faire l'objet d'un négoce en autant qu'on ne la fractionne pas en parcelles comme on le ferait pour un billet de banque (ou un bitcoin). Sa perte est irrémédiable, car son unicité interdit de la remplacer comme on pourrait le faire d'un billet de spectacle.

Un NFT n'est pas l'œuvre, c'est un certificat inviolable qui en garantit l'unicité et qui ne peut avoir qu'un propriétaire.

On pourrait dire que c'est un “certificat de naissance” ou “une preuve de vie” unique qui une fois émis ne peut pas être re-émis, c'est la condition nécessaire pour la spéculation et cela intéresse les collectionneurs. Un NFT crée la rareté quand elle n'est pas naturelle, en effet dans le monde numérique les copies parfaites et bon marché sont faciles à réaliser. C'est même l'inverse qui est difficile : empêcher les copies, naturellement le monde numérique est un monde d'abondance.

Ainsi l'œuvre numérique peut rester visible et copiable par tous, mais le propriétaire est unique, et il peut revendre sa propriété avec un espoir de gain, le NFT ne fait qu'authentifier sa propriété, d'où la dimension spéculative, la technologie lui garantit la permanence et l'inviolabilité de sa possession.

N'importe qui peut créer un NFT, il n'y a pas d'organisme de dépôt ou d'autorisation, mais bien sûr, on doit respecter des protocoles publics.

Qui sont intéressés par les NFT :

  • les artistes ou créateurs de contenu qui tirent profit de la première vente du NFT qu'ils viennent de créer (et éventuellement des futures transactions : royautés possibles), bien entendu en fonction de leur côte sur le marché.
  • les acheteurs qui espèrent un futur gain : spéculation
  • les intermédiaires de toute sorte, car il y en a (libre ne veut pas dire gratuit, toute peine mérite salaire …) : informaticiens, fournisseurs de service informatiques, conseillers de toute sorte, les plateformes de marché qui sont nécessaires comme la plus connue opensea.

Les NFT reposent sur les cryptomonnaies qui elles-mêmes reposent sur les blockchains. Le principe de fonctionnement est le suivant :

  • Un document électronique est créé et protégé par chiffrement : pour le lire, il faut posséder une clé
  • pour que le document soit crédible pour tous, il faut faire la preuve qu'on a travaillée pour trouver quelque chose d'unique, évident pour tous. C'est fait par la découverte d'une solution à un problème mathématique qui nécessite beaucoup de calculs : c'est le minage d'un Bitcoin qui consomme pas mal d'énergie électrique, c'est analogue à trouver une pépite d'or, d'où le nom de minage. Cette solution qui fait partie du document, est à la base l'existence de quelque chose reconnue (un bitcoin par exemple).
  • Pour pouvoir accéder au document, il faut qu'il soit public : il est inscrit dans un annuaire ou registre public (du point de vue informatique, c'est une base de données distribuée et redondante). Cependant, si l'existence du document (par exemple un bitcoin) est publique, son propriétaire ne l'est pas et il est le seul à posséder la clé qui permet de l'utiliser (par exemple pour effectuer une transaction monétaire). Pour qu'il soit protégé contre la fraude et libre de contrôle, le répertoire est copié dans plusieurs ordinateurs indépendants accessibles par tous.
  • Pour accéder au répertoire, il faut un logiciel appelé portefeuille qui contient les documents (par exemple bitcoins) d'un utilisateur, sous la forme de ses clés dont l'existence est reconnue dans le répertoire. Le propriétaire du portefeuille reste privé, il n'est pas connu de la chaîne: seul est reconnu le portefeuille via un code anonyme.
  • les transactions entre propriétaire du document se font via les portefeuilles (perdre son portefeuille, c'est par exemple perdre ses bitcoins), chaque transaction crée une entrée dans le registre, elle est reliée à l'entrée précédente sur ce document, d'où le nom de chaîne, ce qui fait que toutes les transactions sont publiques, mais anonymes puisqu'elles sont faites à partir des portefeuilles, elles ne permettent pas de remonter à leurs propriétaires : on y voit tout ce qui se transige, mais pas ceux qui transigent.
  • les écritures dans le grand registre (la chaîne), en plus de l'obtention de la preuve initiale, sont couteuses en énergie, car elles impliquent des chiffrements et de multiples copies

Ainsi on a un système monétaire public, sans contrôle centralisé et anonyme. C'est le beau côté, le côté gris, c'est celui de la spéculation et de la consommation d'énergie (minage plus ou mois illégal - piratage de temps de calcul-), le côté noir, c'est le blanchiment d'argent possible.

Sans contrôle, en fait, c'est théorique, en pratique le bitcoin est largement contrôlé par un petit groupe d'investisseurs et de mineurs comme l'est devenu internet sous le règne des GAFAM).

Un NFT n'est pas exactement une cryptomonnaie telle que le bitcoin, car il ne peut pas être scindé ou regroupé dans une transaction comme peuvent l'être les monnaies telles que les bitcoins d'où le nom : token veut dire jeton ce qui caractérise son indivisibilité et Non-Fungible parce qu'il ne peut pas être remplacé comme peut l'être un objet consommable comme la monnaie, ce qui correspond bien à une œuvre d'art qui est unique dans son intégrité. Mais s'il est différent il repose sur la même technologie, les blockchains, il est sage de se reposer sur des logiciels, protocoles et services existants.

Le principal choix qui a été fait pour les NFT se repose sur l'Ethereum mieux adapté que le bitcoin pour utiliser une technologie existante. a fin de nourrir une blockchain :

  • la création d'un NFT dans une blockchain commence par la création d'un certificat crédible qui repose sur le calcul, l'espace des solutions possible dans Ethereum est bien plus grand que bitcoin, mais impose quand même une dépense d'énergie (que quelqu'un doit bien payer: on l'appelle le "gaz ou gas"
  • L'achat et les transactions se font en Ethereum, il faut donc disposer d'un portefeuille pour cette monnaie afin de convertir des montants monétaires courants en Ethereum pour permettre la création du NFT

* Pour multiplier les ventes Une option intéressante est de valider des copies avec chacune un certificat, cela correspond aux tirages d'une lithographie ou photo, quand chacune est numérotée et signée l'artiste. Une autre est créer des séries on a donc un certificat pour l'ensemble et un certificat pour chaque élément

  • Ces opérations sont commodément faites par une plateforme de marché NFT telle que opensea(le domaine .io dans le Territoire britannique de l'océan Indien est utilisé par des startups du domaine numérique), on peut y:
    • créer son propre NFT
      • adhésion à la plate-forme
      • assistance à la création d'un portefeuille (wallet) pour l'accès à la blockchain
      • choisir entre quelques blockchains dont Ethereum
      • transiger en différentes monnaies comme le dollar américain
    • magasiner ou faire une enchère sur des NFT

https://www.gwennseemel.com/fr/blog/2021/1216-web-free-point-zero/

"Les estimations moyennes chiffrent à 1 386 KWh la consommation d'une transaction Bitcoin, ce qui permettrait de fournir de l'énergie à un foyer américain pendant au moins un mois et demi. Mais la consommation d'énergie élevée n'est qu'un des problèmes : l'empreinte carbone d'une seule transaction Bitcoin est de 658 kg de CO2, ce qui équivaut à l'empreinte carbone d'environ 1,5 million de transactions VISA“.

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  • Dernière modification : 2023/09/25 18:47
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