La démarche de Cezanne
J'ai commencé à être capable d'aborder vraiment la problématique de l'approche de l'aquarelle avec la lecture du beau petit livre d'un aquarelliste : P. Cezanne Aquarelliste de Jacky Chabert (Editions Desbaumes, 2015) découvert chez un ami, ami de l'auteur, une chance (son site ne répond plus, j'ai vu qu'il a un comte facebook, mais comme j'ai fermé mon compte facebook, je n'y ai pas accès, on peut le voir ici https://fr-fr.facebook.com/people/Jacky-Chabert/100010662521844).
En ce qui concerne Cezanne (pas de é dans Cezanne pour respecter sa signature), j'avais bien depuis pas mal de temps un petit livre de Angelika Khan-Leonhard “Learn from the masters. Create your own watercolor in the style of Cezanne” (Search Press 1991) et réalisé un des exemples.
Et surtout j'avais reçu en cadeau de noël il y a pas mal de temps le beau livre “Les aquarelles de Cezanne” de John Rewald 1984. Je respectais Cezanne, l'avais rencontré dans de multiples lectures et admiré dans les musées, j'avais réalisé quelques tentatives de pastiche à partir du livre de Angelika Khan-Leonhard il y a 20 ans lors de ma première tentative avortée d'aquarelliste, mais je ne me voyais pas adopter le style de Cezanne, ça me dépassait et je le comprenais mal.
Mais tout à coup je découvrais sa démarche, car Cezanne avait une démarche personnelle, il ne peignait pas pour vendre ou faire plaisir à ses amis “Cezanne … ne se préoccupe pas du public … ce qu'il cherche avant tout, c'est d'être satisfait de son travail” (p27, les pages réfèrent au livre de Jacky Chabert)). C'est ce que m'apportait “P. Cezanne aquarelliste”, il fallait un aquarelliste pour me faire comprendre cette démarche : “Copier la nature me suffit … Donner l'image de ce que nous voyons, en oubliant tout ce qui a paru avant nous” (citation de Cezanne p27), quelle humilité mais aussi ambition et aussi quelle illusion, car il avait vu autre chose et ne pouvait l'occulter. Il veut comprendre la nature en ce qu'elle a d'invisible d'éphémère mais permanent pour en représenter ce qu'il en a perçu de primordial. “Une étude n'est ni un témoignage, ni une impression, ni même une illustration d'une histoire; ou encore moins un élément décoratif, Cezanne ne peint jamais le temps qui passe, l'anecdotique” (p28). “Il déplace le centre désintérêt de la peinture, passant ainsi des choses observées, à la conscience de l'observateur” (p29).
Cezanne déconstruit la réalité qu'il voit pour la restituer au point de s'intéresser à la géologie (p32). On comprend qu'il ait ouvert la porte au cubisme, mais il voulait présenter la réalité, quand on compare ses aquarelles (ou huiles) à des photos de ses motifs, on ne peut qu'être frappé par leur fidélité. “Son imagination est pauvre et il ne sait pas dessiner sans modèle.” (p34)
“Dans ses tableaux, Cezanne rassemble les éléments qu'il voit “devant lui”, leur assigne un rôle d'objet, mais va, bien qu'il travaille, comme il disait, “sur le motf”, jusqu'à supprimer l'espace qui les aère. Raccourcissement du trompe l'oeil. Ainsi, il colle littéralement le viaduc du chemin de fer sur la montagne, supprimant volontairement les deux heures de marche qui les séparent dans la réalité” (p37 citation de André Masson).